Décoder les signaux d’apaisement chez le chien : les comprendre pour mieux vivre ensemble

01/10/2025

Pourquoi les chiens utilisent-ils des signaux d’apaisement ?

Les chiens communiquent principalement par le langage corporel. Ils disposent d’un répertoire de signaux, appelés signaux d’apaisement ou « calming signals » (terme popularisé par Turid Rugaas, éducatrice canine norvégienne), pour gérer les interactions entre congénères, humains ou même dans des situations stressantes. Leur but principal : prévenir les conflits, limiter le stress ou exprimer un inconfort.

Dans le monde canin, l’escalade de la tension est non seulement dangereuse mais coûteuse sur le plan énergétique. Les signaux d’apaisement sont donc une sorte de langage universel chez les chiens pour éviter la bagarre, rassurer et désamorcer les malentendus. Être capable de les identifier, c’est ouvrir une fenêtre sur la façon de penser du chien — et adapter notre propre comportement pour une relation harmonieuse.

Les signaux d’apaisement les plus fréquents

Certains signaux sont subtils, d’autres flagrants, certains passent souvent inaperçus. Il ne s’agit pas, pour votre chien, de manipuler ou de faire semblant : on parle de réflexes innés, issus de milliers d’années d’évolution. Voici une liste non exhaustive des signes les plus courants :

  • Se lécher la truffe ou les babines : un mouvement rapide, parfois imperceptible, souvent vu lors d’une approche frontale, d’un stress, ou pendant une interaction vive.
  • Détourner la tête/le regard : éviter de fixer quelqu’un droit dans les yeux est, chez le chien, un signe fort de non-agression.
  • Bailler : loin d’être seulement lié à la fatigue, le bâillement apaise et aide à décompresser.
  • S’immobiliser ou marcher lentement : ralentir montre qu’il ne souhaite ni fuite ni confrontation.
  • Se gratter soudainement : action anti-stress très fréquente lors d’un inconfort social.
  • Renifler le sol : un grand classique pour détourner l’attention, se calmer ou désamorcer une situation tendue.
  • Montrer le flanc ou le dos : s’exposer ainsi est la preuve d’une volonté d’apaisement (jamais d’une provocation).
  • Se mettre en position accroupie, voire s’asseoir ou se coucher : indiquer sa non-dangerosité ou vouloir rassurer.
  • Remuer la queue doucement, basse : n’indique pas forcément la joie, mais parfois la politesse ou l’apaisement.
  • Faire semblant de “faire autre chose” : regarder “ailleurs”, s’intéresser soudainement à la moindre broutille… tout pour éviter la tension.

Comment repérer ces signaux : attention aux contextes

Un même geste peut avoir plusieurs significations. C’est le contexte qui permet de ne pas se tromper :

  • Votre chien se lèche la truffe après avoir mangé ? Pas d’inquiétude.
  • Il baille alors que vous le caressez et qu’il détourne la tête ? Il se sent peut-être mal à l’aise, ou souhaite un espace.

Selon l’Anthrozoology Institute de l’Université de Bristol, on retrouve le léchage de truffe et le bâillement dans plus de 75% des situations où un chien ressent un inconfort émotionnel (source : Bristol University).

Un signal isolé ne signifie pas toujours un malaise profond, alors que plusieurs signaux, répétés ou combinés, méritent attention :

  • Un chien qui détourne la tête, puis se gratte frénétiquement, puis s’éloigne, vous dit clairement « stop, c’est trop pour moi ».
  • Un chien qui s’approche en remuant doucement la queue, puis renifle longuement le sol avant d’interagir, montre sa volonté d’apaisement lors d’une première rencontre.

Signaux d’apaisement face aux humains : ce qu’on loupe souvent

Beaucoup d’humains (moi la première, à mes débuts) interprètent mal les attitudes de leur chien. Voici des exemples parmi les plus fréquents qui passent à la trappe :

  • Lécher la main “gentillement” : parfois un vrai signal pour désamorcer une interaction maladroite (serrer un peu trop fort, rapprocher son visage…)
  • “Sourire” (montrer les dents lèvres relaxées) : bien différent du grognement, ce sourire typique de certains chiens heureux de vous voir se double parfois d’un détour de tête, pour signifier “je t’aime, tout va bien” et “je ne cherche pas la bagarre”.
  • Se poster entre deux personnes en tension : oui, certains chiens tentent aussi d’apaiser… leurs humains ! ScienceDirect, 2017 a même publié une étude montrant que 70% des chiens observés cherchaient à séparer deux humains qui élevaient la voix.

Les signaux d’apaisement chez le chiot

Chez le chiot, les signaux d’apaisement émergent dès la troisième quinzaine après la naissance (source : PLOS One, 2019). Ils apprennent dès tout petits à éviter les disputes, souvent de façon plus exubérante que les adultes, moins subtils aussi !

  • Bâillements exagérés, jusqu’à s’étirer
  • Fausse distraction comme renifler par terre de façon caricaturale
  • Appels au jeu, “salut typique” avant de détaler

Cette période est idéale pour encourager la lecture des signaux entre chiots, mais aussi éviter de “punir” ou d’interpréter de travers leur communication naturelle.

Différencier signaux d’apaisement et signaux de stress : attention aux confusions !

Signaux d’apaisement ne veut pas dire absence de stress : ils servent à l’apaiser justement. Mais si votre chien enchaine ces signaux sans relâche, ou les combine avec d’autres manifestations (halètement, gémissement, tremblements), il passe de l’apaisement à la véritable détresse.

Signaux d’apaisement Signaux de stress avancé
Bâillement, détourner la tête, se lécher la truffe, marche lente Halètement hors chaleur, gémissements aigus, tremblements, refus de contact, fuite
Renifler le sol, se gratter, remuer la queue bas Pilosité hérissée, regard figé, blocage ou immobilisation “gelée”, morsure préventive

Selon l’étude menée par l’université d’Helsinki (Nature, 2018), 45% des chiens présentant des signaux d’apaisement répétés étaient plus sujets à montrer ultérieurement des signes de peur ou d’agressivité s’ils n’étaient pas respectés dans leur communication.

Astuces pour interpréter et réagir face aux signaux d’apaisement

  • Observe dans le contexte : toujours prendre en compte ce qui précède et suit le comportement.
  • Laisse-lui de l’espace : si ton chien détourne le regard, se couche ou renifle le sol, recule d’un pas, parles doucement, arrête toute pression inutile.
  • Évite les punitions pour ces signaux : un chien qui “réagit” exprime un besoin, ce n’est ni de la désobéissance ni de la provocation.
  • Renforce le climat de confiance : privilégie le renforcement positif, récompense un chien qui s’apaise tout seul, félicite une bonne régulation émotionnelle.
  • Prends le temps d’observer d’autres chiens : lors de balades ou en club, regarder les interactions entre chiens affine ton œil !

Des situations concrètes pour s’entraîner

Quelques exemples pour repérer et interpréter les signaux d’apaisement au quotidien :

  1. À la rencontre d’un congénère : si les deux chiens approchent lentement, détourent la tête, reniflent le sol, c’est bon signe. S’ils accélèrent, tendent la laisse, restent figés, la tension monte clairement. Il est souvent utile de dévier la trajectoire, ne pas forcer.
  2. À la maison, pendant l’éducation : si le chien baille ou détourne la tête lors d’un apprentissage, c’est sans doute trop rapide ou trop exigeant. Faites un break, simplifiez la consigne.
  3. Chez le vétérinaire : un chien qui se lèche la truffe, regarde ailleurs, esquisse même un sourire, tente de se calmer. Parlez calmement, récompensez d’un mot doux ou d’une friandise mais laissez-le “décrocher” si nécessaire.

Quand consulter un professionnel ?

Lorsque les signaux d’apaisement se multiplient sans effet, que votre chien semble “hyper vigilant” ou au contraire se fige, grogne ou fuit constamment, il est utile de consulter un professionnel du comportement canin. Idéalement formé à la communication canine et non coercitive (consultez l’MFEC ou les listes d’éducateurs certifiés), il saura pénaliser la situation et vous guider pour restaurer confiance et sérénité.

Observer et respecter, la clé d’une relation complice

Plus on prend le temps de regarder son chien, plus il se met à “parler”. Les signaux d’apaisement sont la base de la communication canine, aussi fondamentaux pour la paix entre chiens que pour l’harmonie à la maison. Pour les amoureux des chiens mais aussi pour les néophytes, voir un chien bâiller, détourner la tête ou s’immobiliser, ce n’est pas de la “soumission” ou de la “malice” : c’est juste sa façon de dire “tout va bien, restons cools”.

La bonne nouvelle ? En apprenant à identifier et surtout à respecter ce langage, on ouvre la voie à une relation plus détendue, où les incompréhensions diminuent, les conflits s’éloignent, et où chacun, chien comme humain, trouve toute sa place… en toute confiance.

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